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mardi 31 janvier 2012

Décès de Chérif Kheddam, ouvrier spécialisé et musicien de génie

L’immense chanteur compositeur kabyle Cherif Kheddam est décédé hier après-midi, lundi, à Paris où il était hospitalisé. Il était âgé de 84 ans.
 

Né en 1927 à Taddert Boumessaoud (Aïn-El-Hammam), Cherif Kheddam, dont la famille est d’origine maraboutique, est envoyé par son père en 1936 pour poursuivre une formation d’imam à la zaouïa Boudjellil, dans la région de Tazmalt.

Il en sort le cursus coranique accompli en 1942 et gagne Alger où il est recruté dans une fonderie à Oued Smar qu’il quittera quelques années plus tard pour cause de différend syndical avec le patron. En 1947, il traverse la Méditerranée. Etabli dans la région parisienne, il travaille dans une fonderie puis dans une entreprise de peinture. Attiré par la musique, Chérif Kheddam prend, après son travail d’ouvrier, des cours du soir de solfège et de chant.

Ceci fait de lui l’un des rares compositeurs traditionnels à savoir écrire et lire la musique. Ses premières chansons sont diffusées dans les circuits de l’émigration. Comme tous les chanteurs de l’époque, il fréquente les cafés et les fêtes où se diffusaient ses chansons. Bientôt, l’une de ses premières chansons, Yellis n’tumert, est enregistrée et diffusée à la radio.

C’est le début d’une carrière singulière qui culminera par la signature d’un contrat avec Pathé Marconi en 1956. La qualité symphonique de ses compositions leur vaudra d’être jouées à plusieurs reprises par l’orchestre de l’ORTF sous la direction de Jean Duvivier. Il enchaîne alors ce qu’il est convenu d’appeler aujourd’hui les «tubes». Lorsqu’il rentre au pays en 1963, il a déjà un répertoire. Nadia, son titre culte, est récurrent sur les ondes depuis 1958.

A la Radio Chaîne II, en plus de son travail créatif, il invente et anime une émission pour les jeunes talents, «Ighennayen Uzekka», qui a fait connaître les artistes kabyles les plus importants d’aujourd’hui, de Aït Menguellet à Idir en passant par Malika Domrane, Ferhat et bien sûr Nouara. En 1995, il retourne en France pour des raisons médicales.

En 2005, il se produit au Zénith de Paris et à la Coupole à Alger pour fêter ses cinquante ans de chansons. Il avait alors 78 ans. Créateur inlassable, passeur, découvreur de talents, Cherif Kheddam demeure une source, un repère. Il n’est pas un chanteur qui ne doive quelque chose à l’ancien ouvrier spécialisé.
 

A. Metref

dimanche 16 octobre 2011

Zimu : «Je préfère les auditoires restreints»

Mourad Zimu est un artiste discret mais qui s’est vite frayé un chemin dans le paysage de la musique kabyle. Il s’est imposé avec une nouvelle touche et un style propre à lui. C’est un «chanteur aux chansons légères, mais lourdes de sens», disait de lui le grand maître de la chanson kabyle, Lounis Aït Menguellet.

Mourad Zimu a plusieurs cordes à son arc. En plus de la chanson, il est également auteur de deux recueils de nouvelles en tamazight, Tikli en 2004, et Amdakel en 2011. Il a aussi été producteur et animateur durant 4 années à la Chaîne II. Titulaire d’une licence en sociologie, et d’un magistère en langue et culture amazighes, il vit actuellement en France pour poursuivre des études doctorales en sociologie. Cet artiste aux multiples talents compte à son actif quatre albums. Ijejigen n tsusmi (les fleurs du silence), Salupri, Maâlich (Tant pis) et Apipri kan sorti en 2007. Mourad Zimu nous apprend, dans cet entretien, que son nouvel album intitulé Nnaqus est enfin prêt et sortira prochainement.



- Pouvez-vous nous parler de vos premiers pas dans la chanson ?


J’ai joué mes premières notes sur une guitare Gianini toute neuve achetée par mon frère Mohwelhadj. J’ai débuté tout seul, puis j’ai animé des minisoirées dans les chambres universitaires avec des potes. J’ai aussi adoré jouer dans les halls d’escalier et dans les douches des cités universitaires d’Alger et de Tizi Ouzou. La résonance de ces lieux était formidable. J’ai tout de suite composé des chansons, là, par contre, je ne sais pas pourquoi j’ai eu ce reflexe. Ensuite, j’ai proposé ces chansons à mon entourage qui m’a encouragé à les partager avec un plus grand nombre de personnes. Mais le problème, c’est qu’il fallait devenir «chanteur» pour partager ce que je faisais. Alors que l’idée de devenir chanteur avec un look, des cheveux, des posters, des chemises ou des tee-shirts bizarres ne m’a jamais séduit. Sans parler de ce que peut exiger ce métier en investissement sur le plan financier, humain et surtout émotionnel. Ce qui explique mon entrée tardive sur la scène : Un album mort-né en 1996 Ijejigen n tsusmi (les fleurs du silence) puis mon deuxième album Salupri édité en 2001.


- A quel genre de musique peut-on classer la nouvelle touche que vous avez apportée à la chanson kabyle ?


Je ne sais pas trop. Tu sais, dans les autres cultures, c’est aux critiques et aux analystes de classer les producteurs dans les domaines artistiques et littéraires, mais chez nous, l’artiste n’a que les échos de la rue. Les gens, quand ils arrivent à reconnaître quelques sons d’arpèges et de guitare, me disent que c’est «un peu» du Si Moh, et ça me plaît de ressembler à ce grand monsieur de la chanson kabyle. Moi, avec un peu de prétention, je m’amuse à me classer dans la nouvelle chanson kabyle à textes. Je sais de plus en plus quand une chanson ou un texte est plus ou moins «à la Zimu». Je suis flatté de voir de nouveaux jeunes talents me dire que Zimu les inspire.


- L’amitié est le terme qui revient souvent dans vos œuvres, avez-vous quelque appréhension quant au risque de voir cette valeur disparaître des mœurs de la société en général et kabyle en particulier ?


Au contraire, je crois que c’est ce qui a résisté au déluge qui a emporté et qui continue à drainer avec lui toutes nos valeurs. Nous étions des groupes d’amis à l’université d’Alger et de Tizi, et notre amitié a résisté au multipartisme (ça ne veut pas dire que le multipartisme est mauvais). On est resté des amis, alors que le politique nous sépare ; on avait soif de liberté, on s’est retrouvé logiquement dans des partis comme le FFS, RCD, PST et PT. Notre amitié a résisté au vent du «khobsisme» qui a soufflé sur notre génération à la sortie de l’université. Et maintenant encore, notre amitié résiste à l’ouragan de l’exil qui souffle sur notre région. Nous sommes restés en contact avec les amis sur les réseaux sociaux grâce à Internet.


- Si je peux me permettre, que fait d’autre Zimu en dehors de la chanson kabyle et de la musique en général ?


La musique et la chanson ne représentent qu’une petite facette de ma vie. Mon intérêt pour la chanson et la musique en général commence à diminuer de jour en jour, même si j’écris et je compose des chansons toujours. En dehors de la chanson, j’essaie d’être un bon fils, un bon père, un bon mari, un bon frère, un bon ami, un bon citoyen et un bon employé. Tu vois donc, je ne chôme pas, il y a tellement de choses à faire pour réussir tout cela et être assez bon partout.


- Comme tout chanteur, en tous styles, a son public, pourrez-vous un jour faire le pas de revoir le vôtre en lui organisant quelques galas ?


Je sais qu’il faut le faire un jour mais quand ? Où et comment ? J’évite de me poser ces questions sans réponse. J’aurais aimé pouvoir faire des galas pour une cinquantaine de personnes pas plus, uniquement avec ma guitare et ma voix, il y aurait peut-être un autre ami à la guitare ou au piano ou même au vocal, mais je ne sais pas si c’est possible. Des sortes de piano-bar offrent ça ailleurs mais je ne sais pas si c’est faisable actuellement chez nous.


- Reformulée autrement, ma question est : si nos institutions culturelles vous proposaient d’animer quelques galas pour ce public, répondrez-vous favorablement ?


Ça va dépendre de la provenance de l’invitation, des conditions du spectacle aussi. Je ne pourrais pas chanter en plein air, par exemple, pour des centaines de personnes réunies dans des stades sous un soleil de plomb. Je ne pourrais pas chanter sur une scène ornée de posters d’hommes politiques. Comme je vous l’ai dit avant, je préfère chanter pour une poignée d’auditeurs qui savent à quoi s’attendre avec moi, une petite salle ou une sorte de petit théâtre, les gens doivent être assis confortablement. Une sorte de soirée conviviale pour écouter des chansons, je pourrais même des fois me permettre de lire le texte d’une chanson avant de la chanter, j’essaierai de parler de sa composition. Je pourrais chanter des chansons qui ne sont pas miennes…


- Comptez-vous un jour composer des œuvres en d’autres langues que le kabyle (traduire par exemple celles déjà existantes en kabyle pour toucher un public encore plus large) ?


Sincèrement non. Les autres langues sont bien protégées et ne manquent pas de chanteurs, et entre nous, que puis-je apporter de plus à une langue qui a la chance de véhiculer les chansons de Brassens, Brel ou Renaud etc. Je suis entièrement satisfait de produire dans ma bonne vieille langue maternelle. A chaque fois que je termine l’écriture d’un vers ou d’une chanson, j’ai le sentiment d’avoir accompli un miracle, d’avoir servi à quelque chose, d’être enfin utile. Les moments que je passe à écrire et composer dans ma langue sont des moments que j’arrache à la vie ordinaire avec toute la monotonie qu’inspire cette expression aux Algériens.


- Avez-vous quelque chose sur le cœur que vous voudrez émettre à votre public et que vous n’avez pas pu lui dire jusqu’ici ?


Juste des remerciements pour ceux qui m’encouragent à continuer. J’ai envie d’adresser un message aux jeunes. Je leur demande d’être positifs. Ecrivez dans votre langue, regroupez-vous en collectifs culturels dans vos villages, montez des troupes de théâtres et des groupes de musique ou faites des actions de volontariat pour protéger notre environnement. Vous avez des différences quand vous débattez politique, mais à la fin vous êtes intelligents puisque vous savez être solidaires pour la bonne cause.

Achour Hocine

APW de Tizi Ouzou : Le FLN se retire de l’alliance avec le RCD

Les tiraillements qui couvaient au sein de l’Assemblée Populaire de Wilaya (APW) de Tizi Ouzou ont éclaté ce dimanche 16 octobre à l’ouverture d’une session ordinaire dont l’ordre du jour portait, entre autres, sur les bilans de la rentrée scolaire et de la saison estivale.

Des élus du groupe FLN se sont élevés, en séance plénière, contre la « gestion partisane de l’APW » et ont annoncé leur retrait de l’alliance avec le RCD. En réponse, le P/APW s’est suffi de réclamer la lettre de démission le jour-même.

A noter que l’alliance RCD-FLN a permis au parti de Saïd Sadi d’obtenir la présidence de l’APW de Tizi Ouzou lors de l’installation de cette assemblée en décembre 2007. En contrepartie, le FLN obtenait deux vice-présidences au sein de l’exécutif.

Cependant, les deux représentants de l’ex-parti unique seront débarqués trois années plus tard, en décembre 2010, à la suite d’un différend au sujet de la commission d’enquête sur le secteur de la culture, voulue par les élus RCD.

A noter que l’assemblée de wilaya est constituée de 16 élus du RCD, 15 du FFS, 10 élus du FLN et 6 du RND.

Salah Yermèche

jeudi 13 octobre 2011

Jean de Crescenzo est décédé le 24 septembre à Paris : Un amoureux de Tizi Ouzou a tiré sa révérence

Jean De Crescenzo nous a quittés le 24 septembre 2011, à l’âge de 78 ans. Il était de ceux qui aimaient Tizi Ouzou et sa Kabylie natale plus que tout. Il vouait une véritable passion pour cette ville qui l’a vu naître un certain 17 décembre 1932.

Issu d’une famille européenne installée à Tizi Ouzou depuis 1880, Jean de Crescenzo avait aussi un arrière-grand-père arrivé à Dellys en 1844. En plus de ses origines italiennes et espagnoles, il avait également un de ses arrière- grands-pères qui était d’origine kabyle, plus précisément de la famille Hassen. Dès son jeune âge, Jean de Crescenzo habitait l’école primaire Gambetta de Tizi Ouzou, où son père Fernand De Crescenzo était instituteur. Passionné de l’histoire de Tizi Ouzou et de plusieurs autres villes et villages de Kabylie, Jean avait entrepris, vers les années 1980, un travail colossal de recherches généalogiques sur sa famille en consultant la presse locale de la fin du XIXe et du début du XXe siècle.

Ces 30 années de recherche et de labeur lui ont permis de fouiner inlassablement dans l’histoire de la Kabylie ancienne et de recueillir ainsi d’importantes informations parfois inédites sur tous les événements quotidiens propres à la ville de Tizi Ouzou et de toute sa région. Les journaux édités depuis les années 1880 étaient déjà légion en Kabylie, à l’image du Sémaphore de la Kabylie, Le Djurjura, Le Courrier de Tizi Ouzou, Le Petit Kabyle, etc. Et le fait de les compulser un à un sur une longue période de près d’un demi-siècle est certainement un travail de fourmi fort méticuleux et une tâche tout simplement colossale.

Pour reconstituer “les premières heures” de la création de la ville de Tizi Ouzou, Jean de Crescenzo a eu également recours aux archives du service historique de l’armée de terre française ainsi que les archives de la France d’outre-mer à Aix-en-Provence. C’est dire que le fruit de ses trente années de recherche et de documentation est tout simplement impressionnant.

Et pour preuve, Jean De Crescenzo a eu le grand mérite d’éditer deux livres à compte d’auteur en France. Le premier, intitulé Chroniques Tizi Ouziennes 1844-1914, a même été édité en Algérie en 2007 aux éditions Alpha, à Alger. Le 2e tome de Chroniques Tizi Ouziennes 1914-1928 n’est disponible pour le moment que sur internet, plus précisément sur un site d’édition de livres à la demande (www.lulu.com).

Dans ces deux ouvrages d’une valeur inestimable, on trouve pratiquement tous les événements dignes d’intérêt sur la vie et l’histoire du “tout Tizi”, mais aussi d’autres localités de la région. Cela va du nom des premiers colons arrivés à Tizi Ouzou jusqu’à la construction de tous les édifices, en passant par les dates de construction des routes, des lignes de chemin de fer en Kabylie, la date d’électrification de la ville ou encore la création des clubs de football de la région.

Par ailleurs, Jean de Crescenzo avait un projet qui lui tenait tant à cœur, en l’occurrence la rédaction d’un 3e tome des Chroniques Tizi Ouziennes qui devait retracer les événements de la période allant de 1928 jusqu’aux années 1950, mais malheureusement la mort l’a emporté avant qu’il ne réalise son œuvre. C’est ainsi que partent malheureusement les hommes de grande conviction et qui auront eu certainement le grand mérite d’avoir laissé derrière eux un véritable patrimoine historique et culturel. Le seul regret réside très certainement dans le fait que Jean n’a jamais revu Tizi Ouzou depuis 1957, date où il a quitté sa Kabylie natale pour rallier la France s’inscrire à l’école supérieure d’électricité (Supelec).

Il avait tellement peur de ne plus retrouver le Tizi Ouzou de sa jeunesse qu’il remettait à chaque fois la date de son pèlerinage. Depuis le retour fabuleux à Tizi Ouzou de son ami d’enfance Marcel Lagarde, qui en est revenu enchanté, Jean de Crescenzo parlait de plus en plus d’un éventuel retour dans la ville des Genêts, mais il continuait à se demander “si c’était réellement une bonne chose”.

Hélas, un tel vœu n’a pu être exaucé puisqu’il rendit l’âme le 24 septembre dernier, et fut inhumé le 29 septembre au cimetière de Père Lachaise, en présence de sa famille et de nombreux Tizi Ouziens résidant à Paris. Repose en paix Jean.

Par : Belkacem Haouchine

Yacine Temlali au Café littéraire de Béjaïa : " Une langue est un instrument pour accéder à la culture"

L’impact de la littérature et du cinéma dans la société, la question de l’engagement et du militantisme dans la production romanesque et cinématographique, ainsi que l’actualité politique et sociale, ont été les principaux axes du débat qui a réuni le journaliste chroniqueur et critique littéraire, Yacine Temlali, avec le public du Café littéraire de Béjaïa, samedi dernier, lors d’une table ronde au niveau du théâtre régional Abdelmalek Bouguermouh.

La question ayant suscité le plus de réactions de la part de l’assistance, était celle relative à ce que certains critiques appellent « la littérature de l’urgence » et qui, de l’avis de bien de spécialistes, sacrifie l’architecture esthétique et poétique. L’urgence de dire le drame et de «témoigner » de la tragédie de la décennie noire (1990-2000) étant la priorité. « Un label » que conteste Yacine Temlali, sans pour autant disqualifier cette littérature-là, car pour lui, « ce n’est pas l’urgence qui va déterminer la qualité ou la validité du témoignage, cette appellation est une sorte de trouvaille éditoriale, parce qu’elle est porteuse au niveau commercial.

Cette littérature est éditée à l’étranger, principalement en France, en raison de l’intérêt majeur pour le contexte tragique de cette période et qui en a été déterminant dans le choix de ces écrivains… ». Nécessité donc, pour le critique littéraire de se détacher du carcan de ce terme et d’observer l’œuvre littéraire d’un point de vue formel d’abord…, il en veut pour preuve, la littérature produite dans les années cinquante, à l’exemple de Dib, Kateb et Mammeri, qui en s’appropriant la langue de l’ancien colonisateur, ont dépassé le simple témoignage pour fonder une esthétique propre au roman algérien, affirmant par là, l’existence d’un peuple conscient de sa condition et faisant de cette langue un instrument de lutte… Nedjma n’a-t-elle pas témoigné des massacres du 08 Mai 1945, et pourtant…

Le constat est le même s’agissant de le production filmique , « je reproche à certains réalisateurs la proximité du discours politique sur la tragédie et j’ai pu voir, dans certains films, comme Rachida de Yamina Bachir-Chouikh, une sorte de traduction cinématographique d’un discours sur la guerre civile, qui de mon point de vue, était un discours un peu sommaire qui ne va pas forcément au fond des choses », affirme le conférencier, et d’insister pour dire que l’œuvre littéraire n’est pas forcément le produit d’un contexte politique.

L’idéal ne serait-il pas de concilier devoir de vérité et devoir esthétique, car littérature est aussi du domaine social en plus d’être celui de l’esprit ? Toujours sur la thématique de la littérature, Yacine Temlali soutient qu’elle ne se doit pas d’être nécessairement engagée : « je ne crois pas que la littérature se doit d’être engagée, il y a des écrivains engagés, d’autres non, ce n’est pas l’engagement qui est déterminant dans la valeur esthétique de leurs œuvres. Il y a des écrivains nombrilistes qui ne parlent que d’eux- mêmes et qui ont la haine du peuple, mais qui sont extrêmement talentueux… Cossery ne porte pas de discours revendicatif sur son peuple, mais l’a servi en parlant de lui et de la condition dans laquelle il vit … » Abordant la problématique linguistique en Algérie et son corollaire à travers la littérature, Yacine Temlali fustige la Francophonie, qui est, selon lui, un simple argument de vente.

Il trouve stérile et sans fondement la polémique de Othmane Saadi sur la politique linguistique en Algérie: « Le fait de connaître une langue, c’est avoir un instrument pour accéder à un patrimoine, à une connaissance, à une culture… ». Sur la question d’un intervenant, contestant le choix des auteurs sélectionnés dans l’ouvrage Algérie, chroniques ciné-littéraires de deux guerres, Ed Barzakh 2011, notamment le choix de Boudjedra comme corpus d’étude, Temlali souligne que bien qu’il ne partage pas les positions politiques de Boudjedra, il ne reste pas moins le meilleur écrivain algérien à ses yeux, qu’il le préfère de loin à Malek Haddad qu’il juge «ennuyeux et d’une naïveté désarmante » …

Le journaliste et critique littéraire se mit à répondre aux questions du public, dans un échange passionné et passionnant. Ainsi, évoquant le métier de journaliste, l’invité du Café Littéraire estime que ce dernier se doit d’être dans un rapport de revendication et non dans un rapport d’amitié avec sa hiérarchie. Il regrette l’absence de critiques littéraires spécialisés dans la presse, notamment écrite, ce qui aurait participer, à coup sûr, à une meilleure approche des œuvres littéraires ! Concernant le traité d’amitié Algéro-Français, le chroniqueur affirme que ce n’est pas « un traité d’amitié qui mettra fin au passif douloureux entre les deux pays (…), l’exemple de la Libye et de l’Italie en est révélateur.

Le traité d’amitié Italo-libyen, signé en 2009, n’a pas empêché l’Italie de faire partie de la coalition… De mon point de vue, l’enjeu majeur demeure les relations économiques privilégiées qu’entretiennent la France et l’Algérie… ce qui est intéressant, pour ma part, c’est comment sont traduits ces rapports sur le plan cinématographique et littéraire… ». Il est à noter que cette séance a été ponctuée par la projection de caricatures réalisées par le talentueux dessinateur, Ghilas Aïnouche.

Nabila Guemghar

Belkacem Hadjadj honoré à Agadir ( Maroc)

Le réalisateur algérien Belkacem Hadjadj, a été honoré, jeudi, 6 octobre, durant la soirée, à l’occasion du coup d’envoi de la cinquième édition du festival international du film amazigh Isni N’Ourgh qui se déroule dans la ville d’Agadir, au Maroc.

Agadir, Maroc

De notre envoyé spécial

Belkacem Hadjadj a realisé plusieurs films algériens, dont on peut citer, entre autres, le long métrage en Tamazight, intitulé Machahou tournée dans la région de Kabylie.

La cérémonie d’ouverture de cette manifestation s’est tenue en présence de plusieurs hommes du cinéma et du représentant de l’institut royal de la culture amazigh (IRCAM).

« Le cinéma amazigh connaît un essor remarquable ces dernières années. Je considère que l’ouverture de la culture amazigh est liée à l’ouverture de la culture politique », a déclaré Belkacem Hadjadj.

Les organisateurs de cette manifestation ont également rendu hommage au peuple libyen. Le chercheur et universitaire, Hassan Aourid, est revenu aussi, dans sa langue allocution, sur le combat des militants de la cause identitaire, notamment en Algérie, citant, entre autres, le travail de l’anthropologue et écrivain Mouloud Mammeri, le parcours du chantre de la chanson kabyle Matoub Lounes, assassiné en 1998 .

Le président d’honneur du FINIFA a rappelé également les événements d’avril 1980 et de 2001 en Kabylie, avec une pensée particulière à Guermah Massinissa et tous les martyrs du printemps noir.

Par ailleurs, dans la salle, nous avons également remarqué la présence du comédien algérien Fawzi Saichi, dit Remimez , le commissaire du festival du film oriental de Genève, Tahar Houchi, le réalisateur péruvien Cisar Galido et Ali Bouhouf, président de l’association sud nord évolution qui organise, chaque année, la semaine du cinéma algérien à Lille, en France ainsi que Hamid Rebahi, représentant du commissaire du festival du film amazigh en Algérie.

Hafid Azzouzi

Le film documentaire La langue de Zahra se distingue à Agadir : Emotion et nostalgie

Projeté samedi dans une salle archicomble à Agadir (Maroc), ce documentaire de la réalisatrice algérienne Fatima Sissani, qui a décroché le premier prix du Festival international du film amazigh, a donné des frissons à l’assistance qui a suivi avec beaucoup d’attention ce long métrage.

Agadir (Maroc)
De notre envoyé spécial

Le documentaire intitulé La Langue de Zahra, réalisé par Fatima Sissani, une journaliste originaire d’Iferhounène, en Kabylie et qui vit en France depuis l’âge de 6 ans, a suscité beaucoup d’émotion et de nostalgie lors de sa projection, samedi, en soirée, à Agadir, au Maroc, dans le cadre du Festival du film amazigh. Ce produit a décroché le premier prix de cette édition qui s’est clôturée en apothéose, dimanche. Projeté dans une salle archicomble, ce film a donné des frissons à l’assistance qui a suivi avec beaucoup d’attention ce long métrage qui parle de la vie des Kabyles en France. Il évoque aussi l’attachement d’une mère à sa terre natale. Ce produit a été tourné en France et dans les villages d’Iferhounène, avec les images magnifiques d’Azrou N’Thour, un endroit féerique perché sur les hauteurs des majestueux monts du Djurdjura.

C’est là où est organisé, chaque saison estivale, le rituel Assensu, une fête grandiose qui draine des milliers de personnes. «Les Kabyles existent d’abord par la parole. Chaque geste et chaque instant de leur quotidien peut donner lieu à une langue poétique pleine de métaphores, de proverbes… Ne dit-on pas que dans des contreforts montagneux dont ils sont les hôtes, la joute oratoire était un exercice courant. Dans une société de l’immigration, les hommes et les femmes kabyles, souvent analphabètes, sont exclusivement relégués aux rangs d’ouvriers ou de femmes au foyer… On imagine mal les orateurs qu’ils deviennent quand ils retournent à leur langue.

Cette réalité, je l’ai présentée et j’en ai réalisé toute l’acuité mesurée en filmant ma mère, son quotidien et son histoire», nous dira la réalisatrice lors des débats à la fin de la projection : «L’essentiel de mon travail tourne autour de l’immigration, de l’exil. L’exil m’obsède, me fascine et me colle à la peau. Cette fois-ci, c’est ma mère que j’ai laissé s’interroger sur des morceaux de la vie que je n’avais pas trouvé le moment ou l’audace de questionner», nous a-t-elle ajouté.

Notons que le documentaire de Fatima Sissani sera projeté en novembre prochain au Festival Trace de vie à Clermond Ferrand et à Saint-Denis, durant le même mois. En décembre, il sera également à l’affiche à Grenoble, au Mans, en janvier et à Montpellier en février. Par ailleurs, durant la même journée, on a assisté également à la projection des films Hmed Oulkadhi, un roi berbère de l’Algérien Djamel Aït Iftène, La Caravane du Marocain Abdeslam Idrissi, La Chanson de la vie du Péruvien Cisar Galindo, Izenzarene de Christian Lorre, entre autres.

Rappelons, par ailleurs, que la veille, le jeune Farid Cherfaoui avait présenté son court métrage Les bergers du Djurdjura tourné dans la commune d’Aït Bouadou, en Kabylie. Originaire des Maâtkas, dans la wilaya de Tizi Ouzou, Farid est un jeune réalisateur qui entame une carrière prometteuse dans le cinéma. Il a, pour rappel, décroché le Prix spécial du jury lors de la dernière édition du Festival du film amazigh qui s’est tenu, en mars dernier, dans la ville d’Azeffoun, dans la wilaya de Tizi Ouzou.

Hafid Azzouzi

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