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mardi 13 octobre 2009

Entretien avec Amgid, le Prolétaire : "L’artiste doit chercher ses mots !"

Natif du village Tizit dans la commune d’Illiltèn, le chanteur Amgid, de son vrai nom Merabet Amokrane, revient dans cet entretien sur l’évaluation de la chanson kabyle à travers la poésie. Brillant chanteur, cet artiste se dit plus poète que musicien, pour lui, il n y a pas d’art sans recherche.

La Dépêche de Kabylie : A quand remonte votre début dans la chanson .

Amgid : Cela remonte aux années 80 et même un peu avant. Au début, j’ai dénoncé toute forme d’impérialisme et de dictature, la ligne politique de l’Amérique et celle de l’ex URSS. Un chanteur de gauche quoi, mais je ne cautionnais aucun extrémisme. Il s’avère que le capitalisme dans son essence est immoral, peu enclin à la justice... Après ce fut les évènements du Printemps 80, ce qui a donné une autre dimension à la chanson kabyle. Avec beaucoup d’autres, comme Ferhat, nous avons soutenu la cause berbère , je chante encore en faveur de celle-ci, car je crois qu’on n’en a pas encore fini avec les dérives du pouvoir d’Etat actuel. Au cours de la même année, en 80, je fus arrêté à l’aéroport d’Alger à cause de certains titres de mes chansons. Il est utile de signaler que mes deux premiers albums avaient un ancrage prononcé avec la réalité politique algérienne.

Quel est votre avis sur la chanson kabyle actuelle ?

Musicalement chacun est libre d’écouter ce qu’il veut, mais en matière de langue, nous devons respecter le contexte et le texte. On entend des chansons composées en trois langues ! Cela porte préjudice à notre culture en général et à la langue en particulier, il se trouve que l’on fuit la recherche et l’originalité la base de toute œuvre artistique. On évite de puiser dans nos sources et ressources pour tomber dans la facilité et le simplisme, pourtant, nous avons une langue et une culture très riches, un patrimoine de vitalité. Actuellement , il y en est qui veulent faire de Tamazight du Créole, une demi-langue. Chacun est libre aussi de chanter avec d’autres langues, mais pas en usant de slogans passés et repassés ! Celui qui ne peut pas faire de la poésie kabyle, au sens propre du terme, doit chercher ses mots et respecter sa langue.

Cette débauche de production en tout genre semble voulue sur le plan politique. Il faut qu’on arrive à produire en Tamazight, à produire bien et à promouvoir la qualité du contenu comme de la forme, on devrait pouvoir faire des documentaires culturels et scientifiques par exemple. Les proverbes, les contes, les anecdotes, l’histoire, les expériences de la vie, tout doit être transmis. Il ne faut pas faire de notre culture une lettre perdue en cours de route, c’est quelque chose de mémorable et de vivant !

Des slogans, qu’est ce que vous voulez dire par cela ?

Il n y a pas de poésie dans la chanson actuelle, surtout pas dans le“spécial fête”, c’est une chanson d’appoint et d’ambiance, sans aucune recherche musicale ou politique pouvant apporter un plus à notre culture.

En ce qui me concerne, je me considère plus comme poète. Voyez Edith Piaf, elle a une force vocale extraordinaire, et encore on n’a pas besoin de connaître le français pour sentir cela. En matière de musique, chaque style à son auditoire. Il n’y a pas de musique intelligente au sens rap, il faut dire que chaque style à sa vocation. Ce qui se passe reste un effet de mode, peut être que la chanson kabyle vit une période de transition, elle vit son époque comme on dit. La vision change d’une époque à l’autre est-ce mieux ? Est-ce plus moderne ? Chanter l’amour oui, mais pas de manière vulgaire ! Il n y a plus de messages à transmettre ? ça c’est grave ! Il faut chanter dans une langue travaillée, c’est la moindre des choses.

On sent que la culture occidentale domine. Pour sa qualité. Nous devons pouvoir produire en tamazight des textes et une musique modernes en accord avec les exigences de notre temps.

Propos recueillis par A. Boufatis

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