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mercredi 7 octobre 2009

Interview avec le cinéaste Saïd Bellili

"Le soleil se lèvera bien demain" est un feuilleton historique de 15 épisodes d’une durée de 52 minutes chacun. Se situant entre 1954 et 1962, il raconte le quotidien d’une famille algérienne durant la guerre de Libération nationale.

La Dépêche de Kabylie Pour les lecteurs et lectrices qui ne vous connaissent pas, qui est Saïd Bellili ?

Said Bellili : est un jeune cinéaste algérien… (rires) si vrai que si on regarde l’âge, je ne suis pas jeune mais si on regarde ma carrière cinématographique, on peut dire que je suis jeune parce qu’elle est un peu courte, mais si on regarde aussi le nombre de productions que j’ai faites, je ne suis plus jeune. Quand même j’ai une certaine expérience et une certaine ancienneté dans le domaine du cinéma. Je peux dire que je suis né avec le cinéma. Dès mon jeune âge, j’étais intéressé et captivé par le cinéma, j’ai toujours fréquenté les salles de cinéma, j’étais très curieux par rapport à l’image,au son, aux acteurs et je me posais beaucoup de questions sur le tournage, et les effets spéciaux. Je vais vous raconter une petite histoire, j’avais 7 ans quand mon père m’a emmené une fois au marché où on a rencontré un homme portant un costume blanc. Alors, j’ai demandé à mon père de m’acheter un costume comme celui-ci, il m’a répondu que c’est les artistes qui portent des costumes blancs, je lui ai répondu que moi aussi je suis un artiste… Dieu merci, jusqu’à présent, j’ai fait quatre films et j’ai eu plus d’encouragements que de critiques… et le dernier mot revient au public de juger tel ou tel artiste.

Ça fait combien de temps que vous êtes dans le cinéma ?

Ça fait 11 ans que je suis dans le cinéma, ma carrière d’artiste je l’ai débutée dans le théâtre où j’était metteur en scène, j’ai écrit quelques pièces théâtrales. J’étais animateur chez les scouts, de là, j’ai eu l’occasion de réaliser mon rêve et d’aller vers le cinéma.

Et vous avez fait une formation dans le domaine du cinéma ?

Oui, j’ai fait une petite formation accélérée de 6 mois parce qu’on n’a pas eu la chance de fréquenter les anciens centres et écoles étatiques comme l’ENPA et le CRIC, alors j’ai fait une formation de réalisateur à Alger. En outre, j’essaie toujours de continuer à m’instruire même seul car on peut toujours apprendre de nouvelles choses sur le cinéma. Aujourd’hui, je pense qu’on est chanceux car avec l’Internet, on peut obtenir énormément de connaissances sur n’importe quel domaine y compris le cinéma.

Vous êtes sur le point d’entamer votre cinquième produit, pouvez-vous nous donnez un aperçu ou un synopsis ?

C’est vrai, j’ai déjà fait le tour de manivelle le 09 juillet passé, au Palais de la Culture avec la présence de grandes figures du cinéma comme les réalisateurs Lamine Merbah et Rachid Ben Allal. C’est un feuilleton historique de 15 épisodes d’une durée de 52 minutes chacun, qui parle de la guerre d’Algérie, il se situe dans la période de 1954 à 1962, et s’intitulera "le soleil se lèvera bien demain", le scénario est de Rachid Smaili. Le fait de réaliser un feuilleton historique est une responsabilité très lourde mais je suis entouré par une bonne équipe technique. Je veux que ce feuilleton soit un miroir pour que le public et le peuple algérien en général se reconnaissent dans ce film mais aussi pour mettre l’accent sur les repères du pays, comme je souhaite passer aussi un message à la jeune génération pour qu’elle reconnaisse les sacrifices qui sont faits pour qu’elle devienne libre et indépendante j’espère qu’on sera à la hauteur et en mesure de répondre aux aspirations du peuple algérien.

Vous avez déjà organisé un casting. Allez-vous enrôler des figures déjà connues de l’écran ou vous allez vous basez beaucoup plus sur les nouveaux talents ?

Concernant les acteurs, les rôles principaux sûrement seront joués par des professionnels mais on va donner la chance aussi aux jeunes talents et là, je préfère ne pas citer de noms. Concernant l’équipe technique, à la direction photo, un nom très connu dans le monde du cinéma algérien, c’est Zine.

Pouvez-vous nous parlez de vos autres produits; vous avez quatre films entre documentaire, court métrage et long métrage…

"Les sinistrés" est un documentaire que j’ai coréalisé en 2000, le deuxième est un documentaire que j’ai réalisé en 2002, il s’intitule "A la recherche du bonheur", l’objectif était de sensibiliser les gens par rapport à la cause des handicapés. Le troisième, je l’ai réalisé en 2005 c’est un court métrage que j’ai intitulé "La rencontre mortelle", il parle de la prévention de la maladie du sida malgré que ce soit un sujet tabou mais le sida existe bel et bien dans toutes les sociétés y compris la nôtre et on ne peut pas l’ignorer. Quant au quatrième travail, c’est un long métrage intitulé " la malédiction " sorti sur les écrans en 2008.

Vous avez à votre compte déjà de nombreuses participations aux festivals de cinéma, parlez nous un peu plus de ces expériences

Effectivement, j’ai participé à tous les festivals du film amazigh que se soit à Annaba, Tlemcen ou à Bel Abbès. A l’étranger en 2003, j’ai participé à Bobigny lors de l’année de l’Algérie en France, j’ai pris part aussi au festival de Taghit en 2007.

Revenons un peu à votre projet actuel...

Comme je vous l’ai dit, c’est un feuilleton social et historique à la fois car il traite le vécu de la société algérienne pendant la guerre de Libération nationale, c’est un projet auquel j’accorde un grand intérêt parce que je veux rendre hommage à travers ce travail, à tous ceux et celles qui ont subis l’atrocité et la répression coloniale. C’est un hommage au million et demi de chouhadas et à ceux qui vivent encore, et qui gardent de douloureux souvenirs et les séquelles de la guerre.

Rencontrez-vous des entraves ou des obstacles lors de l’exercice de votre métier ?

Evidemment, les obstacles sont nombreux dans tous les domaines toutefois, il faut croire à ce qu’on fait pour avancer et surmonter les difficultés parce que la clé de toute réussite c’est le sérieux et la persévérance. L’obstacle majeur rencontré par tout cinéaste est sans l’ombre d’un doute, le manque de moyens financiers parce que sans ces derniers, on ne peut pas faire de la création cinématographique ; c’est très difficile d’obtenir des aides ou des subventions pour la réalisation d’un film mais quand même, on ne baisse pas les bras. Dernièrement, il y a des cinéastes qui veulent relancer ce secteur, les autorités doivent les encourager.

Pensez-vous que l’apparition ou la création de nouvelles chaînes peut relancer ou aider le secteur du cinéma à se remettre ?

Bien sûr, toute nouvelle chaîne est une aubaine pour les cinéastes, c’est un espace d’exposition, d’expression et de rencontre entre les spécialistes de l’art et de la culture et bien évidemment, le déverrouillage du secteur de l’audiovisuel ne peut qu’être bénéfique pour le secteur du cinéma. Ça va contribuer à la connaissance de la langue, la culture, l’art et ça va améliorer aussi l’image de notre pays.

Un petit mot de la fin !

D’abord, je tiens à remercier la dépêche de Kabylie qui nous a accordée la chance de rester en contact avec le public, comme je profite de l’occasion aussi pour lancer un appel aux jeunes et les inviter à fréquenter les salles de cinéma et de se rapprocher des cinéclubs et des associations qui activent dans ce domaine afin de découvrir le monde merveilleux du cinéma. Il faut qu’ y ait une relève mais pour que cela se concrétise, il faut que l’Etat ouvre des écoles et des centres pour permettre aux jeunes talents de suivre une formation dans les domaines de cinéma, de photographie, etc.

Réalisé par M. C. Ait meziane

Comment fertiliser le terrain vierge de la mémoire et de l’histoire ?

" La culture n’est ni à hypothéquer ni à brader "
Aït Menguellet


Dans la situation neurasthénique où se trouve l’activité culturelle dans notre pays, il semble que les festivités sporadiques qui se déroulent de temps en temps sous différents labels –arabe, africain, mois du patrimoine,…- ne font que montrer en creux le déficit et la vacuité qui hantent nos structures culturelles le restant de l’année. La permanence et la profondeur de l’acte culturel ne peuvent être réduites à des activités conjoncturelles.

Rien que sur le plan du patrimoine matériel où sont recensés les sites et les restes des civilisations passées, l’Algérie constitue à l’évidence un vaste territoire riche de ses vestiges allant de la période préhistorique jusqu’à la colonisation française, en passant par la civilisation berbéro-romaine, les dynasties musulmanes du Maghreb central et les vestiges turcs. De nombreux lieux de culte, des cimetières, des mausolées et des cités entières attendent qu’un geste des pouvoirs publics vienne les sauver non seulement de l’oubli, mais surtout des mains criminelles qui ne cessent de les saccager et de les effacer de la mémoire culturelle du pays. Les exemples ne manquent pas.

Des personnalités et des associations se sont élevées contre les dégradations du site de Timgad qui surviennent à chaque édition du festival annuel qui se tient dans cette ville. Les ruines du village de Djouab, dans la wilaya de Médéa, abritant l’histoire de l’antique Rapidium, bastion de Takfarinas, sont tout simplement en état de ruine du fait qu’aucune prise en charge scientifique de ce legs n’y a été réalisée. Dans le meilleur des cas, ce genre de site et d’infrastructure demeurent des éléments du patrimoine laissés à l’abandon et plongés dans un superbe anonymat. La revalorisation de la mémoire culturelle et historique du peuple algérien ainsi que les possibilités d’investissement touristique autour de ces valeurs ont été longtemps obérées par l’ignorance, l’incompétence et l’esprit de rente.

Rompre avec le folklore et l’apparat

C’est souvent en dehors de la frénésie de circonstance que se font- quand bien même ce serait dans le quasi anonymat- les efforts les plus méritoires pour la réhabilitation des valeurs culturelles du pays. N’est-ce pas que l’on peut remonter la pente des chemins de l’indifférence et de la médiocrité par des gestes qui paraîtraient d’une courante banalité pour des béotiens trop longtemps engoncés dans un doucereux fatalisme ?

Pendant les journées de la célébration du mois du patrimoine –matériel et immatériel-, en avril 2009, une exposition d'inscriptions libyques a été organisée au musée national Ahmed Zabana situé au cœur de la ville d'Oran. Les inscriptions lybiques, dont la majorité se trouve sur les sites historiques du Sud algérien, sont rarement exposées et vulgarisées dans des lieux de culture comme les musées ou dans les écoles. La collection ainsi exposée et qui est conservée au musée Zabana, a fait l'objet d'une restauration par les élèves de l'École régionale des Beaux-Arts d'Oran, formés dans ce domaine par des experts de l'Association espagnole ‘’Restaurateurs sans frontières’’ (A-RSF). Cette manifestation, initiée en collaboration avec l'A-RSF, a pour objectif de mettre en valeur une période méconnue de l'histoire, située entre le 10e et le 3e siècle av. J-C., comme a tenu à le souligner le directeur du musée Zabana, M. Hadj Meshoub. Cette action a été fortement appréciée par les visiteurs dont certains ont été sidérés de découvrir une graphie autrefois connue à l’échelle de toute l’Afrique du Nord. Cependant, elle fut acculée vers les zones désertiques après l’occupation romaine qui instaura la langue latine comme langue de communication et d’administration. Le musée Zabana, fondé à Oran en 1879 par la Société de géographie et d’archéologie de la province d’Oran, a été érigé en 1986 en Musée national chargé d’abriter, de conserver et de promouvoir les pièces, outils, sculptures, peintures, manuscrits et autres objets relatifs à l’histoire de l’Algérie, particulièrement ceux recueillis sur le territoire de la région de l’Ouest algérien.

Dans le cadre de ce travail de restauration des anciennes inscriptions et de l’exposition du produit final, le sentiment de la redécouverte de soi par une plongée dans la culture historique du peuple algérien est ainsi partagé aussi bien par les élèves de l’école des Beaux-Arts qui ont réhabilité de vieilles graphies de nos ancêtres que par les élèves-visiteurs. C’est un sentiment qui nous hante face à l’amour et à la dévotion dont font montre tous les gens épris d’authenticité et de vraies valeurs culturelles qu’ils tentent, contre vents et marées, de faire partager aux autres par des actions simples mais ô combien rédemptrices.

Des gestes pédagogiques comme ceux qui sont initiés au cours de ces dernières années et pouvant, à première vue, paraître anodins ou banals, viennent néanmoins réveiller la curiosités des visiteurs et particulièrement des élèves qui n’ont pas toujours la possibilité matérielle de se déplacer sur les sites abritant ce genre de précieux legs culturel.

Message et mémoire : comment rendre visible l’Algérie d’antan ?

Le jugement vaut aussi pour le tout récent Musée des arts modernes algériens (Mama) qui occupe la coupole mauresque des anciens locaux du Monoprix de l’ex-rue d’Isly (actuelle Larbi Ben M’hidi). La position centrale de cet établissement au cœur d’un boulevard commerçant et très passant de la capitale lui procure une sollicitation particulière des visiteurs. La tradition culturelle dans notre pays ne destine malheureusement pas les jeunes écoliers ou universitaires à se rendre sur les sites historiques ou dans les musées dans un geste censé devenir naturel et spontané. C’est un travail long et ardu qui attend aussi bien les responsables de la Culture que le monde associatif et les établissements d’enseignement pour faire aimer les lieux de culture et d’histoire comme les musées, les sites vierges ou les points de fouilles.

La culture muséale dans notre pays n’a pas encore acquis ses véritables lettres de noblesse pour qu’elle devienne le ‘’pain quotidien’’ de nos enfants à l’école et en dehors de l’enceinte scolaire. Le cas de l’ ‘’Association des amis du musée de Cirta’’ de Constantine est aussi à mettre en exergue particulièrement lorsqu’on sait qu’elle agit dans un environnement peu favorable à ce genre de ‘’luxe’’ ou d’ ‘’exotisme’’. Peut-être unique dans son genre sur le territoire national, elle mobilise souvent des adultes et des enfants autour de l’art muséal, de la préservation du patrimoine matériel et immatériel et, plus globalement, autour des valeurs de la culture, la vraie, et non celle du simple folklore et de l’apparat.

Cette association prend sur elle d’initier les élèves, dans le cadre de ce qui dénommé ‘’Ateliers juniors’’, à l’archéologie et aux moyens de préserver le patrimoine culturel national. Elle organise pour eux des ateliers et des sorties sur des sites historiques de l’Est du pays, la région d’Algérie qui compte le plus de sites et de vestiges de l’histoire ancienne du pays (antiquité berbéro-romaine, dynastie hafside, vestiges ou pièces turcs, période coloniale). Pour avoir visité à plusieurs reprises ce bel édifice planté en plein centre de la ville du Rummel, au milieu d’autres édifices publics du XIXe siècle, nous avons pris conscience de la valeur des pièces, outils, statues, mosaïques et autres objets qui y sont conservés depuis près d’un siècle. De Batna,Tébessa, Khenchela,…, des bustes, des mosaïques, des silex, des lampes, des dessins, ont été acheminés jusqu’ici pour rendre ‘’visible’’ notre patrimoine. Mais, comment rendre visible, faire percevoir le sens et la portée d’une telle accumulation et d’une telle succession d’étapes, d’efforts de l’homme et de civilisations qui ont eu pour théâtre la terre d’Algérie à des écoliers, collégiens et lycéens qui n’ont de l’histoire qu’une notion abstraite à l’aspect rébarbatif ? Comment contribuer par ces actions à former le citoyen de demain, fier de son passé riche et varié et s’intégrant sereinement dans la communauté nationale ? C’est le défi lancé par cette association dans une ambiance non seulement d’indifférence, mais, parfois, d’adversité. "Nous n’avons reçu que deux subventions durant cinq années d’existence. Un argent dépensé essentiellement pour l’achat du matériel de bureau. Depuis, l’association s’est vu couper les vivres pour deux saisons consécutives. Si notre programme a été bien mené c’est bien grâce au dévouement et aux sacrifices des membres de l’association", affirme la directrice du musée.

Sur les terres maternelles du Sahara

Hormis certains aspects folkloriques par lesquels les autorités culturelles du pays s’acquittent de leur conscience en en ressassant les images à échéances régulièrement fixées, la culture du Sud algérien n’a pas encore trouvé son chemin sur le plan de l’expression pour qu’elle soit partagée d’une façon conviviale et harmonieuse par l’ensemble de la Collectivité nationale. Les aspects folkloriques qui ont mis cette culture ancestrale au contact des gens du Nord étaient au départ de véritables valeurs criant l’authenticité et même l’universalité d’un message humaniste transmis par les habitants de ces vastes espaces qui n’ont de désertiques que le nom et l’idée que veulent bien leur coller les gens en rupture de ban avec les racines profondes de l’Algérie. L’imzad, Othmane Bali, Adel M’zab, Djibril (le légendaire guide touristique qui a été à l’origine de la célébrité dont jouissent Henri Lhote et les gravures rupestres du Tassili) et d’autres figures ou rites –comme le Moussem, la Sbiba- souffrent d’un déficit de ‘’contextualisation’’ et de mise en perspective qui en feraient de véritables valeurs culturelles et historiques issues d’un monde riche et grouillant d’images, de vie et de spiritualité ; un monde qui n’aurait jamais dû cesser d’être nôtre.

Les images actuelles qui nous parviennent de ces territoires à la fois proches et lointains sont malheureusement brouillées par nos prismes déformants et nos visions stéréotypées. On n’est pas loin d’un certain exotisme de pacotille développé par le tourisme de bas étage.

La plus ancienne présence humaine en Algérie-celle attestée par les peintures rupestres du Tassili des Ajjers sur des centaines de kilomètres carrés- est, depuis quelques années soumise à de multiples pillages et actes de vandalisme dont une partie est régulièrement rapportée par la presse écrite. Des pièces volées de la région de Djanet et Bordj El Houas, mises à part celles interceptées par les services de sécurité, sont écoulées dans les pays d’Europe et parfois cédés à des musées qui les sollicitent.

Substratum de l’être national

Cette partie de la mémoire algérienne bradée à tout va représente pourtant la ‘’couche d’assise’’ de l’être national qui remonte à des moments protohistoriques peu ‘’diserts’’ sous d’autres cieux.

Les données de la géographie physique placent l’Algérie parmi les pays sahariens les plus touchés par la notion de désert. Sur l’ensemble de sa superficie, une proportion de quatre cinquièmes représente les zones arides, soit environ deux millions de kilomètres carrés.

Bien qu’il dispose de 1200 km de littoral, notre pays-comme ont eu à l’analyser des historiens de la culture-est plutôt orienté vers l’intérieur, mis à part les intermèdes phénicien et turc où la mer avait eu ses lettres de noblesse en matière de défense, d’échanges commerciaux et d’ambiance culturelle et sociologique. Saint Augustin écrivait : ‘’Nous qui sommes nés et qui avons passé notre adolescence au milieu des terres, nous nous sommes faits une idée de la mer à la seule vue d’un peu d’eau dans une coupe’’. En 2006, s’est tenu à Alger le rendez-vous biennal, le troisième du genre, du Festival des cultures et civilisations des peuples des Déserts du monde. En 2003 et 2005, ce fut respectivement Timimoun et Dubaï qui eurent à organiser un tel festival. Les initiateurs du Festival d’Alger ont fixé à cette manifestation des objectifs aussi bien culturels-échanges et interactions entre les communautés des contrées concernées- qu’écologiques de façon à pouvoir dégager les voies les plus rationnelles et les moyens les plus appropriés pour contribuer à la lutte contre la désertification.

Vestiges d’une vie exubérante

Si ces espaces se trouvent aujourd’hui désertés par les populations en raison de la rudesse des conditions de vie qui y prévalent, il n’en a pas toujours été ainsi. Pour preuve, les cultures profondes et ancestrales de ces pays portent l’empreinte d’une vie, certes marquée par l’effort et le labeur, mais riche, dense, voire même parfois exubérante. Pour le cas de l’Algérie, deux ères de l’histoire proche et lointaine confirment une activité débordante des espaces sahariens où, malgré l’adversité, les populations ont su évoluer dans un équilibre qu’elles ont ingénieusement entretenu. La période de l’industrie néolithique a vu, au Tassili des Ajjers, l’une des civilisations les plus florissantes s’établir au Sud du pays, phénomène qui, depuis les explorations de Henri Lhote et Th. Monod au milieu du 20e siècle, n’a cessé de surprendre et d’intriguer les chercheurs par sa profondeur et son étendue.

Les dernières recherches de l’anthropologue Nadia Hachid ont davantage affiné et approfondi les connaissances scientifiques de cet espace au point de pouvoir étonner les chercheurs à qui on doit les premiers éléments d’information sur ce sujet. La région, déclarée Parc national- le plus grand musée à ciel ouvert du monde-, s’étend de Djanet jusqu’aux confins de Tamanrasset. L’autre grand moment de l’histoire de ces territoires est sans aucun doute le grand mouvement commercial ayant établi les routes sahariennes et les caravansérails de Tombouctou à Ouargla et de Sijilmassa à Tlemcen. À la même occasion, les échanges culturels et les brassages ethniques ont assis l’aire culturelle sahélo-saharienne. L’un des meilleurs systèmes communautaires sahariens, impliquant organisation sociale solidaire, équilibre environnemental et domestication de la nature au profit de l’homme (ce qu’on appelle aujourd’hui développement durable), a été fondé il y a mille ans à El Ateuf, une des Pentapoles de la vallée du M’zab. Les dernières inondations, octobre 2008, qui ont emporté hommes et biens dans la vallée du M’Zab sont, dans une vaste proportion, un signe du non respect des valeurs ancestrales en matière d’urbanisme, d’activité économique et de gestion de l’espace.

La grande rupture historique qui a conduit à l’abandon de ces terres maternelles et à l’exacerbation de l’hostilité des éléments de la nature par un déséquilibre écologique de plus en plus compromettant, c’est bien la colonisation et le grand triomphe du capital qui ont fondé les grandes villes et même déplacé certains centres de gravité de l’activité humaine.

Le défi qui se pose à des pays comme l’Algérie est de savoir comment rendre justice-par des actions de développement durable, d’activité touristique respectueuse de l’âme locale et de l’environnement- à ces espaces qui constituent aujourd’hui la première source de rente de la collectivité.

Pour les pays ayant en commun le Sahara, il est nourri l’espoir d’un développement harmonieux de leurs territoires qui leur ferait retrouver un équilibre humain et écologique avec leur milieu naturel et qui jetterait des passerelles d’échanges fructueux entre les différentes communautés dans un élan de solidarité et de nouvel humanisme africain, selon l’expression de l’académicien sénégalais Léopold Sédar -Senghor.

Un patent déficit de vulgarisation et de pédagogie


L’on doit prêter une attention soutenue aux énergies bénévoles et aux compétences passionnées qui, ici et là, tentent de combler, du moins en partie, les déficiences et les ‘’omissions’’ de l’école algérienne. Ces dernières sont malheureusement trop nombreuses pour qu’elles puissent être rattrapées par un simple travail de volontariat. Si seulement celui-ci pouvait bénéficier de l’aide et de l’assistance des pouvoirs publics. Pour les cours de botanique et de géologie, rares sont les établissements qui prévoient des sorties sur le terrain. Sous d’autres cieux, la première connaissance géographique est celle relative au village et à la commune où résident les élèves.

En prenant connaissance des roches, de la nature du sol , des ruisseaux, des plantes et des bestioles qui composent le paysage local, l’écolier commence à se fixer dans un ‘’pays réel’’, une terre qu’il apprendra à aimer. C’est lui éviter, ainsi, la haine de soi et le complexe de l’étranger, paradis pathologiquement magnifié jusqu’au stade de l’esprit ‘’harraga’’. Or, pour peu que nos potentialités naturelles soient rationnellement exploitées et que nos gisements culturels intelligemment préservés et mis à la disposition de la communauté, le vrai paradis est bien ici, chez nous.

Il n’en demeure pas moins que, malgré les limites objectives dans lesquelles est circonscrit le travail d’une association ou d’une individualité prise dans l’étau de la bureaucratie administrative, ce genre d’initiative va légitimement droit au cœur. Cela est d’autant plus vrai qu’une grande partie des associations- happées par des intérêts politiciens ou bassement matériels- ne font arborer ce titre que pour des desseins ou usages intéressés et interlopes.

Pillage et bradage des pièces culturelles

C’est après un constat alarmant fait par les services de sécurité et la presse nationale que Mme la ministre de la Culture a annoncé, en mars dernier, un plan d’urgence pour le renforcement de la protection du patrimoine culturel et de la lutte contre toutes formes d'atteinte aux bien culturels ou de tentatives de trafic de ces biens. Les informations sur les vols, la destruction et le trafic des biens culturels matériels (pièces de musée, tableaux de peinture, peintures rupestres,…) qui va jusqu’à l’exportation illégale vers les pays voisins ou vers l’Europe ne cessent de se multiplier et d’inquiéter l’élite éclairée du pays. Le membre du gouvernement a essayé de sensibiliser l’opinion et surtout les autres partenaires de l’administration (services de sécurités, APC, wilayas,…) pour apporter leur part de contribution à la protection des pans entiers de la mémoire du peuple algérien et de ses valeurs culturelles ancestrales.

Dans un domaine aussi sensible de la vie de la Collectivité nationale, où la symbolique et le poids de l’Histoire jouent un rôle prépondérant, la sensibilisation permanente et à tous les niveaux des institutions du pays demeure incontestablement la meilleure arme pour protéger et promouvoir ce précieux legs de l’histoire nationale millénaire.

C’est assurément une légitime fierté pour le ministère de la Culture d’avoir pu récupérer la statue de Marc Aurèle, empereur et philosophe romain qui a marqué de son empreinte la Méditerranée au début de notre ère. Un Mois du patrimoine, période pendant laquelle s’organisent journées d’études et campagnes de sensibilisation autour du précieux legs, matériel et immatériel, laissé par les générations qui nous ont précédés et dont l’âge remonte souvent à…l’âge de pierres, ne suffit guère pour vulgariser notre patrimoine culturel et sensibiliser les citoyens à son importance. A plusieurs reprises, des spécialistes, des médias et des responsables chargés du secteur ont tiré la sonnette d’alarme sur le sort réservé à certaines pièces culturelles ou historiques, mémoire supposée indélébile du peuple algérien. Le phénomène du vol de pièces archéologiques et de musée a pris une ampleur inquiétante au cours des quatre dernières années. Il ne se passe pas un mois sans que la presse ne fasse état de vol, pillage, vandalisme, concernant le patrimoine culturel et historique de notre pays.

Ce nouveau phénomène de vandalisme particulier nous jette à la figure l’étendue de notre impuissance et la puissance notre inconscience face à ce qui prend l’allure d’une forfaiture nationale commise à l’endroit de la mémoire et de l’histoire du peuple algérien.

Y a-t-il façon plus pernicieuse de tuer le sentiment d’appartenance à un pays, à une culture, à une civilisation ? Y a-t-il manière plus avilissante de jeter la jeunesse algérienne dans le giron du nihilisme et dans les bras de l’intégrisme en leur faisant perdre les repères les mieux établis historiquement?

Se réapproprier les signes et la mémoire

Nul besoin de se plaindre par la suite du complexe des Algériens vis-à-vis de l’étranger et du sentiment de la haine de soi qui ont mené, dans une combinaison explosive avec le chômage et la misère sociale, au suicide et à la ‘’harga’’ !

Le ministère de la Culture compte impliquer davantage les services de sécurité dans le domaine de la préservation du patrimoine culturel. Même s’ils sont nécessaires, ces efforts ne sont manifestement pas suffisants. Il s’agit d’abord de sécuriser les structures (musées, parcs, écomusées,…) chargées de la préservation des pièces archéologiques par un système de vigilance permanente.

Des inspections et des audits réguliers doivent accompagner la gestion du patrimoine. Sur les grandes aires où reposent des centaines, voire des milliers, de pièces archéologiques à ciel ouvert (parc national du Hoggar-Tassili, site archéologique de Brizina, au sud d’El Bayadh, les Djeddars de Tiaret, les sites de Aïn Sefra,…) ou dans les villes antiques comme Timgad, Tipasa, Tigzirt ou Djemila, l’action des pouvoirs publics est plus que sollicitée. Elle est le seul moyen qui puisse arrêter la saignée de la mémoire collective des Algériens et qui, hélas, commence, en partie, à être bradée en lambeaux sur les marchés de brocante d’Europe ou dans les magasins des antiquités, et en partie, à être consumée par le béton.

Reste la grande œuvre de faire sentir aux enfants d’Algérie le caractère sacré du patrimoine historique du pays, qu’il soit matériel ou immatériel, et l’absolue nécessité de la sauvegarder et de le promouvoir. Cette dernière action suppose une autre ‘’industrie’’, une autre intelligence nationale qui a pour nom le tourisme. Les sites historiques et les pièces culturelles sont considérées, dans cette optique, la ‘’matière première’’ du secteur touristique. Sur ce plan aussi, notre pays accuse un immense retard pour mettre en valeur ces lieux, les rendre accessibles par l’installation des routes, de l’énergie et d’autres équipements spécifiques, et préserver l’équilibre et l’harmonie de l’environnement qui font l’authenticité et l’originalité de ces sites.

Les pièces culturelles (outils, silex, bustes, dessins rupestres, manuscrits, mausolées,…), les sites historiques et les éléments du patrimoine immatériel (culture orale, mythes, légendes,…) constituent le continuum historique de l’être algérien, de sa conscience et de sa mémoire. Ils sont censés donner vie à une intense activité culturelle matérialisée dans les musées, les festivals, la recension des manuscrits, contes et légendes ; comme sont censés se mobiliser autour de ces tâches les moyens audiovisuels, particulièrement publics, pour servir de support à des activités pédagogiques dans les écoles et les universités. Ces dernières structures en plus du cas spécifique de la branche archéologie dont c’est le domaine d’intervention privilégié- sont aussi appelées à organiser des sorties sur le terrain des villes antiques et d’autres sites abritant une partie de la mémoire collective du peuple algérien.

Amar Naït Messaoud

Les feintes de Hannachi, le poujadiste

Invité, hier soir, de l’émission Addal+ de Berbère TV, le président de la JSK a tenté d’expliquer la situation du club et a été surtout interpellé, par de nombreux courriels, sur le sulfureux contrat de sponsoring signé avec le quotidien Echourouk.

Un premier dérapage antisémite d’abord. « Echorouk n’est pas un journal juif que je sache ! », tempête Hannachi en direct depuis Paris, la ville lumière.

Passons, l’antisémitisme étant intégré comme un « vice normal » dans la culture nationale, d’autant que l’animateur oublie de relever cet écart et semble même lui donner acte en apostrophant son invité par un :
« C’est justement Echourouk qui traite les Kabyles de juifs ! »

Globalement, Hannachi a fait mine de ne pas comprendre le fond des critiques essuyées à propos du parrainage d’Echourouk, dont la ligne éditoriale s’inscrit dans les « non-valeurs » – le vocable est de Abdou Bouziane – islamo-populistes. L’ancien stoppeur de la JSK choisit la feinte affolée et le « botage » en touche. Il tente de réduire le sujet à un problème de langue arabe, de concurrence avec La Dépêche de Kabylie, dont il convoquait la pertinence, par ailleurs, lors d’une diatribe anti-Lang à propos de la méforme des joueurs, le journal ayant noté que la JSK avait gagné sans brio face à l’AS Khroub.

Brouillon, il met au défi ceux qui sont contre le sponsoring de lui procurer « 1,2 milliard de centimes » de manque à gagner qui en résulterait, un défi qui traduit une approche mercenaire de la question du financement du club et un déni de critique à l’encontre de tous les supporters moins les éventuels milliardaires d’entre eux. Hannachi qui avoue ne pas lire l’arabe, tente de défendre, plutôt mal que bien, Echorouk. « S’il dit du mal de la région, il ne peut le tenir que des Kabyles qui appartiennent à sa rédaction. » Acculé, il prétend qu’Echorouk va s’amender du fait de son rapprochement avec la JSK. Le monde à l’envers quoi ! Ce serait celui qui paye qui s’adapterait aux exigences de celui qui reçoit ? « Echourouk est un journal algérien et je ne vois pas pourquoi je vais me défaire de son sponsoring », croit triompher Hannachi.

Ainsi l’ algérianité est présentée comme un mérite en soi qui dispenserait de tout autre considération, un peu l’inverse de la judéité, une tare inexpiable comme chacun le sait. Pourtant c’est là une qualité que partagent tant de gens, de Bokhaüs, le gendre félon d’un certain Jugurtha, à ceux qui saignent à blanc l’économie nationale en passant par les éventreurs de femmes. Mais Hannachi, qui joue son jeu tout en se cachant derrière son jeu, ne tardera pas à perdre le ballon. Il cesse enfin de parler de napperons là où il est question de… torchon. Une phrase prononcée par le chairman trahit une nette perception des enjeux liés au dossier de sponsoring d’Echourouk. « On m’a donné le choix de transcrire le nom du journal en arabe, en tamazight ou en latin et j’ai opté pour cette dernière graphie », révèle-t-il.

Ouf ! Il n’est donc pas bête l’animal ! Car cette latitude graphique, qui jure avec toutes les théories du marketing et de la gestion d’image, n’est consentie, on s’en doute, à aucun autre club algérien. Au total, Hannachi confirme tout le bien que beaucoup pensent de lui : un poudjadiste, c’est-à-dire un politicien à courte vue, qui a fini par désincarner un fort symbole de la région kabyle. Sa gestion faite d’un continuel « rentre-dedans » avec les valeurs de démocratie, de pluralité et de progrès partagées par l’immense majorité des supporters des Canaris aura fini par donner un club, qui collectionnait les lauriers de guerres, sur un brouillage notable de sa mission et de son identité dont l’affaire Echourouk n’est qu’un énième avatar.

Du maladroit hommage aux «sinistrés de Bab El-Oued» au plus fort de la répression contre la Kabylie durant le Printemps noir au burnous offert à Belkhadem, parfait parangon du crypto-islamiste officiel, combien de fois les supporters ont dû ravaler leur rage par la faute d’un Hannachi, aux troubles ambitions, qui fait tout pour faire de la JSK ce qu’elle n’est pas ? La mythique JSK qui soulevait l’enthousiasme des foules et la verve des poètes n’est plus qu’un « club comme les autres » auxquels ses supporters, qui s’accrochent à une résurrection sans cesse ajournée, vouent un ambigu rapport d’attraction-répulsion.

La régression des ambitions, avec cette incapacité de passer au challenge de la Champions League africaine, se conjugue avec la stagnation organisationnelle, avec le refus de transformer la JSK en SPA, idée novatrice et transparente suggérée par Rebrab puis Haddad, deux potentiels bailleurs avec lesquels Monsieur Hannachi refuse de s’entendre. Tant et si mal que la grande JSK a fini par devenir une pale copie d’elle-même en jouant au petit-bonheur-la-chance le championnat et en se contentant de challenges dont elle a, depuis longtemps, épuisé le charme.

Mohamed Bessa

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