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jeudi 5 novembre 2009

Entretien avec Dr Mohamed Mansouri, directeur général du CHU de Mohamed-Nedir (Tizi-Ouzou)

A la tête de l’une des structures hospitalières les plus importantes du centre du payas, M. Mansouri, s’est investi, depuis son arrivée à Tizi-Ouzou dans le renforcement des capacités du CHU Mohamed-Nedir, tout en se lançant le défi d’ouvrir de nouveaux services pour de nouvelles spécialités. Dans cet entretien, il revient sur la très palpable mutation qu’a conne l’hôpital, que ce soit en matière de capacité d’accueil, d’utilisation de technologie de pointe dans la chirurgie, de la relance de la recherche spécifiée et appliquée, ainsi que des embûches (très nombreuses) qui contraignent la structure et l’empêche de se développer comme voulu et programmé par la direction.

La Dépêche de Kabylie : D’emblée, pouvez-vous nous faire la présentation du CHU Mohamed-Nedir, ses capacités d’accueil, les différents services, ses effectifs.

Le centre hospitalo-universitaire de Tizi-Ouzou est un établissement à vocation régionale englobant les wilayas limitrophes par un bassin de population avoisinant 3,2 millions d’habitants et couvrant certaines disciplines comme la cardiologie, l’oncologie, la sérologie avec prise en charge de malades émanant de nombreuses autres wilaya du pays.

Avec 890 lits techniques, il est passé à 1100 lits organisés et de 31 services à 42 services englobant ainsi l’ensemble des disciplines médico-chirurgicales de biologie, de radiologie et autres explorations.

Le personnel exerçant au niveau de l’établissement avoisine les 250 travailleurs avec 16 professeurs, 120 maîtres assistants, 140 médecins spécialistes, 280 résidants et 870 paramédicaux, sans tenir compte des recrutements prévus pour l’année 2009. L’établissement offre des soins hautement spécialisés, il assure la formation d’environ 250 médecins généralistes par une centaine de spécialistes.

On croit savoir, et c’est de l’avis de beaucoup d’observateurs, que le CHU est sorti des sentiers battus des années passées depuis votre prise en main. Quelles ont été les mesures urgentes prises et ou se situaient les blocages ?


Il est vrai que la dynamique mise en place accompagnée par une volonté de bien faire de l’établissement (médicaux, paramédicaux, technique, administratif et corps commun) a permis d’impulser les changements nécessaires. En effet, dévoyée de ses véritables missions, l’établissement avait subi toutes les dérives, avec toutes les conséquences que vous connaissez. De ce fait, notre premier souci était de rétablir ses véritables missions : il s’agissait de remettre en place une organisation des différents responsables de l’établissement, avec leurs tâches, missions et objectifs ; de mettre en place de projets de services, et d’un projet d’établissement qui constituerait le tableau de bord voire le plan direction de l’établissement avec recensement des différentes insuffisances, moyens, structures et ressources humaines (audit) ; de rétablir la confiance auprès de la population (accueil, information, lutte contre les évacuations abusives, le racket des malades... Cette opération a débuté dès mon arrivée, fin 2003, et obéi a des orientations fixé par la réforme hospitalière.

La première étape a consisté en une mise à niveau de la structure en constituant deux unités (Nédir et Belloua), d’une unité de consultations et d’une clinique dentaire de 50 fauteuils qui a abouti en 3 ans à une remise à niveau de l’ensemble des services sur le plan infrastructure.

La deuxième étape a consisté a mettre en place des équipements nécessaires à une concrétisation des objectifs diagnostique, thérapeutique et de formation par l’acquisition d’équipements de dernière génération, en concentrant le maximum d’efforts sur les urgences médico-chirurgicales qui constituaient le talon d’Achille de l’activité de l’établissement. De toutes ces dernières, elle n’a pas bien sûr était facile, car la résistance au changement a été notre lot quotidien pour les blocages. Il s’agit d’une résistance au changement basé sur la rigueur, la discipline, le respect d’horaires, la lutte contre la dilapidation, et le détournement de malades, l’évaluation de l’activité, l’écoute du citoyen, et la prise en charge de ses doléances.

Peut-on connaître approximative le nombre de malades qui se présentent au CHU ? et de quelles pathologies souffrent-ils en dominance ?

En matière de statistiques, je peux vous assurer qu’aujourd’hui le CHU de Tizi-Ouzou a une activité très intense. L’amélioration de la prestation de soins, le développement de nouvelles activités, la présence de nombreuses compétences ont fait qu’aujourd’hui le taux d’occupation des lits avoisine les 100% pour l’ensemble des services, taux qui était de 55% en 2004. A titre d’exemple, l’établissement a pris en charge en 2009 environ 1200 malades pour le seul service d’oncologie médicale, 300 pace-maker ont été placés en cardiologie, 150 actes de cardiologie interventionnelle. La table n’a été installée qu’en juillet 2009. 140 cancers du sein opérés, 20 implants cochléaire mis en place, 10 malades porteurs du cancer du larynx, 140 cas de sclérose en plaque, toute la chirurgie du rachis traumatique et la chirurgie réparatrice osseuse, 2000 interventions de chirurgie infantile dont une grande partie réparatrice. L’établissement réalise chaque année 18 à 20 greffes rénales, et ce, depuis l’année 2006, 30 greffes de cornée par an. 180 insuffisants rénaux sont pris en charge, toute la neuro-traumatologie des quatre wilayas avec un service de réanimation chirurgicale et de réanimation médicale, et de toxicologie. 300 urgences par jour. L’activité d’urologie présente aujourd’hui une grande place dans la prise en charge de certains cancers de la vessie, de la prostate et a permis avec l’apport de nouvelles techniques acquises par l’équipe d’arriver à des techniques non invasives et à des résultats très appréciables. Ainsi la plupart des services bénéficient aujourd’hui de la présence de compétences qui leur ont permis de développer des activités hautement spécialisées.

C’est le cas de la cardiologie qui a actuellement mis en place toutes les techniques non invasives de traitement des pathologies lourdes (troubles du rythme, coronaropathie…). Beaucoup d’autres services se penchent actuellement sur les pathologies émergentes et les conséquences de beaucoup d’autres maladies dites du développement : AVC, cancérologie, diabète, HTA…

De ce fait, le service de neurologie à mis en place une organisation pour la prise en charge des AVC, de la maladie d’Alzheimer. Quant à la pathologie la plus dominante, les données restent celles de l’ensemble du pays ; toutefois, il y a lieu de préciser que certaines données épidémiologiques font ressortir certains chiffres. Pour le cancer du sein, le cancer du colo-rectal, le diabète sont en deça des données nationales.

A ce titre, le CHU dispose d’un service de sénologie (120 cancers du sein sont opérés chaque année).

Quelles sont les nouveautés apportées au CHU en matière d’équipements modernes, afin de faire face aux urgences et besoins médicaux ?

En réalité, il s’agissait de faire remplir à l’établissement ses missions de centre de référence destiné à assurer les soins hautement spécialisés, une formation de qualité et d’impulser la recherche pour les les services existants. La mise à niveau a été un impératif suivie de la mise en place d’un projet de service et d’objectifs tracé avec les chefs de service concernés.

Pour les services qui n’existaient pas, leur création à vu le jour en 2007-2008 et 2009. Il s’agit de la chirurgie cancérologique gynécologique, l’oncologie médicale, la cytogénétique, la transplantation, la cardiologie interventionnelle, la gastro-entérologie et prochainement la chirurgie thoracique. Il y a lieu de préciser que pas moins de 110 milliards de centimes ont été investis dans l’achat d’équipements dont 40 milliards uniquement pour les équipements d’imagerie médicale (scanner, IRM, tables de radiologie spécialisée, table de cathétérisme, echodoppler…). L’ensemble des blocs opératoires a été refait avec mise en place d’équipements neufs et de dernière génération. Le plateau de biologie a lui aussi bénéficié d’un apport considérable en moyens. L’ORL et l’ophtalmologie ont bénéficié d’équipements modernes permettant toutes les techniques.

La cardiologie a bénéficié d’une table de cathétérisme qui permet aujourd’hui le diagnostic et le traitement de pathologies lourdes de manière non invasive.

Peut-en connaître l’enveloppe budgétaire annuelle allouée au fonctionnement du CHU et sa répartition aux services et des pathologies signalées ?

L’enveloppe budgétaire de l’établissement est assez conséquente et en une progression qui a permis à ce jour à l’établissement de remplir ses missions. A titre d’exemple : uniquement dans le médicament, la consommation de l’établissement est de 140 milliards de centimes ; pour les équipements, pas moins de 20 milliards de centimes sont consommés chaque année. De même, les moyens ont suivi pour la concrétisation de toutes les instructions relatives à l’amélioration des conditions d’hospitalisation et de restauration du malade.

La répartition de l’enveloppe obéit à des chapitres de la nomenclature budgétaire et qui tient compte du nombre de lits et de l’activité. Toutefois, le développement d’activités et la mise en place d’objectifs autour des affectations spécifiques sont bien suivis. Les programmes de réduction de transfert à l’étranger et la prise en charge des maladies orphelines ont bénéficié d’affectation budgétaire conséquente. A titre d’exemple : 40 milliards sont consentis uniquement pour les produits de chimiothérapie pour le traitement des différents cancers.

Qu’en est-il du projet de l’hôpital régional à la wilaya de Tizi-Ouzou ?

Certes, le CHU devient exigu, mais la wilaya a bénéficié de nombreux projets d’appoint tels que le centre de désintoxication et d’un hôpital de jour.

Pourquoi des malades, sont, quelquefois déviés pour des interventions chirurgicales vers des cliniques privées ?

Beaucoup a été fait pour lutter contre ces dérives et les résultats sont aujourd’hui palpables.

Je peux vous assurer que le personnel est aujourd’hui convaincu de sa mission qu’il assure avec sérieux, honnêteté et abnégation. Il reste que quelque rares cas continuent à entacher la noble mission, notamment dans certaines activités d’exploration et de chirurgie. Des mesures coercitive ont été mises en place et ont abouti à sanctionner certains. Ce serait mentir que de vous dire que les dérives ont totalement disparu, mais elles restent aujourd’hui minimes et isolées. Les concernés sont connus, ce sont eux qui tentent d’entraver le changement. Ce qu’il faut faire ? Les textes sont clairs, les lois de la République sont claires. Elles s’appliqueront à chaque fois que de tels cas seront constatés.

Votre avis sur la réforme de la politique hospitalière ?

La réforme hospitalière comme la réforme du système de santé constituent des préalables indispensables à l’amélioration de la qualité de soins. On a beau dire, les résultats sont là. Regardez les incidences des maladies transmissibles, les programmes de prévention, l’espérance de vie des Algériens qui a atteint aujourd’hui 79 ans. Donc une nette amélioration de la santé.

Ces réformes nécessitent la participation de tous. L’objectif étant un système de soins équitable, accessible à tous et de qualité

Entretien réalisé par Khaled Zahem

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